La drague « Cap Croisette » Vie et devenir d’un navire de travail portuaire

Des ports régionaux d’Occitanie à l’Amérique du Sud, l’histoire de Cap Croisette est celle d’un navire de travail portuaire, au service de l’entretien des ports du littoral méditerranéen.

Cap Croisette est construit en 1977 dans les ateliers hollandais IHC Verschure. À cette époque, il ne s'agit pas encore d'une drague mais d'une barge à clapet (bateau dont la coque s'ouvre en deux) de 65 m de long et 12 m de large. C'est en 1982 qu'elle est transformée en drague aspiratrice mobile pour le compte du Service maritime et de navigation du Languedoc-Roussillon (SMNLR), service de l'État affecté au littoral et à son aménagement. Cap Croisette fait alors partie de la flotte de dragage du SMNLR et de son Groupement d'Intérêt Économique « Dragage Port ». Elle devient propriété de la Région Languedoc-Roussillon en 2007 dans le cadre de la décentralisation des ports d'intérêt nationaux métropolitains. Rénovée et repeinte en 2009, elle arbore depuis sa livrée bleu et rouge caractéristique. La drague Cap Croisette a été utilisée jusqu'en juin 2023 pour l'entretien des ports régionaux, en particulier Port-la-Nouvelle et Sète. Vendue à l'été 2023, elle quitte le port de Sète le 6 septembre 2023.

Drague aspiratrice Cap Croisette, en service dans le port de Port-la-Nouvelle.

La drague Cap Croisette était utilisée pour maintenir les profondeurs des ports régionaux afin qu’ils restent navigables : maintien de la profondeur des chenaux d'accès aux ports, des chenaux de circulation intérieure et des bassins d'évolution et d'accostage.

Cap Croisette en cours de draguage dans le chenal de Port-la-Nouvelle.

Basée sur des relevés bathymétriques (technique qui permet de mesurer la profondeur et le relief sous l'eau), l'opération de dragage consistait à ramasser, par aspiration au moyen d'un bras articulé et de sa pompe immergée, les surplus de vase et de sable au fond des chenaux et des bassins. Le dragage ne se limitait cependant pas à l'extraction de ces matériaux. En réalité, c'est un cycle de travail qui comprend la mise en dragage et le remplissage du puits à déblais, la navigation jusqu'au site de clapage, le clapage (vidange des déblais par ouverture de la cale), la navigation retour et le rinçage du puits pendant le trajet. La drague Cap Croisette charriait annuellement 250 000 m3 de vase et de sable dans les trois ports régionaux : 200 000 m3 à Port-la-Nouvelle, 50 000 m3 à Sète, 2 000 m3 sur la passe extérieure du Grau-du-Roi.

1 : puits à déblais et équipements à tribord (bossoirs d'élinde et élinde) ; 2 : bossoirs et mise à l'eau de l'élinde ; 3 : le poste de dragage ; 4 : puits à déblais en cours de remplissage.

À bord de Cap Croisette, le dragage était assuré par une bordée de 6 marins : un capitaine, un second, un dragueur, un chef mécanicien, un maître d’équipage, un matelot et un graisseur. Chaque bordée, une de jour et une de nuit, travaillait sur un cycle de 12h.

1 : le poste de commande et le poste de dragage ; 2 : bordée de nuit de Cap Croisette.

Les zones de travail sont choisies par le capitaine et le capitaine d'armement qui envoient un message aux autres bateaux pour prévenir du dragage. À son poste, le dragueur démarre la centrale hydraulique, met l'élinde à l'eau, la positionne au fond, assure le suivi du dragage et remonte l'élinde en fonction de la hauteur d'eau du puits à déblais. Le capitaine et le second assurent la conduite de la drague. Le chef mécanicien se charge de l'entretien (petite maintenance) et du contrôle des appareils auxiliaires (moteurs et pompes).

Réglage et entretien du moteur diesel de la centrale hydraulique.

Alors que la drague Cap Croisette fonctionnait grâce à plusieurs moteurs diesel assurant la propulsion du bateau et l’extraction des déblais, elle va être remplacée par une nouvelle génération de navire. La nouvelle drague « Hydromer », construite par les Chantiers Piriou (Finistère), a été livrée à la Région Occitanie au début de l’année 2024. Cette drague de 70 m de long est la première au monde à être équipée d’une motorisation mixte diesel-hydrogène. Elle sera prochainement mise en service pour assurer le dragage nécessaire au bon fonctionnement des ports régionaux. Quant à la drague Cap Croisette, elle a été étudiée et photographiée par le service Connaissance et Inventaire des Patrimoines avant de quitter l’Occitanie.

À l’occasion de l’édition 2024 d’Escale à Sète - Fêtes des traditions maritimes en Méditerranée, l’ancienne drague « Cap Croisette » est mise à l’honneur dans le cadre d’une exposition photographique. Une vingtaine de photographies donne à voir ce navire et son équipage. Elles ont été réalisées en juin 2023, quelques jours avant le départ de Cap Croisette pour Rotterdam, puis le Brésil.

Crédits :

Photographies : David Maugendre (c) Inventaire général Région Occitanie

Texte : Lisa Caliste, Direction de la Culture et du Patrimoine.

Conception : Christelle Parville, Direction de la Culture et du Patrimoine.

Remerciements aux équipes de la Direction de la Mer.