Mathieu Dorais Mathieu dorais est un étudiant-athlète recrue du club d'athlétisme rouge et or. il se spécialise dans le lancer du poids et étudie en temps plein à la faculté des sciences sociales au baccalauréat en relations industrielles.

Jamais Mathieu Dorais n'aurait pensé faire de l'athlétisme. Encore moins devenir un lanceur de poids au niveau universitaire. Mais la vie de ce hockeyeur de haut niveau a pris une tournure tout aussi inattendue que bouleversante il y a quelques mois, quand le cancer a transformé sa vie. Découvrez le parcours fascinant de Mathieu Dorais, de gardien de but à lanceur de poids.

D'UN FILET À UN AUTRE : L'HISTOIRE D'UN BATTANT

Mathieu Dorais est un sportif dans l’âme. Depuis qu’il est tout jeune, il vit pour le sport. Il s’intéresse à la grande majorité de ceux-ci. Il en pratique plusieurs. Mais son préféré, c’est le hockey. Il en mange. Jamais il n’imaginerait sa vie sans hockey.

Mathieu excelle comme gardien de but. Rapidement, il fait partie de l’élite. Après avoir joué au meilleur niveau pee-wee possible, il choisit le Collège de Lévis pour le programme sport-études hockey. Il porte ensuite les couleurs des Corsaires de Pointe-Lévy au Midget espoir et Juvénile division 1, avant d’enfiler le chandail des Commandeurs de Lévis Midget AAA pour finir la saison. Son parcours secondaire terminé, sa route l’amène ensuite au niveau Junior AA.

Pendant la pandémie, il affronte les lancers des joueurs professionnels et de la LHJMQ qui s’entraînent au Séminaire St-François en attendant la reprise de leur ligue respective. C’est à ce moment qu’il commence à ressentir une douleur au pied droit. Mais les blessures font partie du sport, encore plus quand ton rôle est de stopper des rondelles.

Mais la sensation est particulière. La blessure est récurrente.

« C’est comme si je me cassais le pied à tous les mois. »

Au début, son médecin de famille suspecte une vilaine fracture de stress. Mais le temps passe et rien de s’améliore. Un second médecin entre dans le portrait et pousse la réflexion, et les examens, à un autre niveau. Il le fait consulter un spécialiste, qui découvre une toute petite tumeur au petit orteil.

« Le spécialiste n’était vraiment pas inquiet. Il m’a rapidement dit que ce genre de tumeur était bénin dans 99% des cas. Qu’après une petite chirurgie, je serais de retour sur patins dans deux semaines. »

Mais cette fois, Mathieu n’est pas du bon côté de la statistique. Il est dans le 1%.

Une biopsie préopératoire révèle que la tumeur est maligne. Mathieu est atteint d’un sarcome d’Ewing, une rare forme de cancer qui s’attaque aux os et aux tissus mous.

Ce qui devait être une intervention mineure devient un cauchemar pour la famille Dorais. Mathieu devra subir des traitements de chimiothérapie aux deux semaines pour les neuf prochains mois.

Après quatre mois de traitements difficiles. Après quatre mois d’effets secondaires importants. Après quatre mois de montagne russe d’émotions. Mathieu rencontre son spécialiste à nouveau. Et les nouvelles sont mauvaises. Afin de diminuer les risques de récidive et de maximiser ses chances de guérison, son équipe soignante en arrive à une conclusion difficile pour la prochaine étape de son traitement.

L’amputation.

Mathieu, gardien de but au hockey il y a 150 jours, devra subir l’amputation de Chopard. C’est 75% de son pied qui sera amputé, soit toute la partie avant, jusqu’au talon. La surprise est totale, le choc est majeur.

« Il y a le choc de l’annonce. Puis celui de savoir que je ne pourrai plus jamais rejouer au hockey. Les prothèses pour ce genre d’amputation ne permettent pas d’enfiler des patins. J’ai rapidement compris que le hockey, tel que je l’ai connu, c’était terminé pour moi. »
La portion jaune représente la partie du pied amputée.

Mais Mathieu, grand sportif de nature, ne s’apitoie pas sur son sort. Il choisit d’accepter son nouvel handicap et d’affronter le défi qui se présente à lui. Et c’est par le sport qu’il entend se relever.

Avril 2023. Mathieu est en rémission totale, mais épuisé par les épreuves et les traitements qu’il vient de subir. Dès son début de remise en forme, il rencontre la physiatre Ariane Rajotte-Martel, qui lui conseille de reprendre le sport le plus rapidement possible. Le meilleur moyen de retrouver son énergie, dit-elle.

Mathieu entre en contact avec l’organisme Parasports Québec. Il est impatient de découvrir quels sports pourraient lui convenir, lui qui a rapidement rayé le hockey sur luge de ses options. Il veut un nouveau départ.

Établi dans la grande région de Québec, on lui suggère d’approcher le Club d’athlétisme de l’Université Laval, qui propose un volet sportif pour les personnes ayant une limitation physique. Jamais l’athlétisme ne lui avait traversé l’esprit. Comme tout le monde, il en a pratiqué à l’école primaire et secondaire. Comme tout le monde, il a regardé les épreuves principales aux Jeux olympiques. Mais, il a toujours eu une petite curiosité supplémentaire pour les lancers.

En juillet 2023, accompagné de l’entraîneuse Nathalie Séguin, Mathieu lance ses premiers poids, en position assise. Doté d’un bon physique et d’un talent naturel, il impressionne rapidement.

Le mois suivant, il rencontre Joey Lussier, l’entraîneur des lancers du Rouge et Or de l’Université Laval. Après quelques entraînements, les deux conviennent d’essayer en position debout. Mathieu a la piqure. Et ses entraîneurs n’en croient pas leurs yeux.

Au même moment, Mathieu est sur le point d’entamer sa quatrième année en Relations industrielles à temps plein à l’Université Laval et Joey Lussier termine son alignement de lanceurs pour la prochaine saison universitaire.

Les conditions sont en place. La motivation est à son comble. Et c’est ainsi, à l’automne 2023, quelques mois après s’être fait amputer les trois quarts de son pied, que Mathieu Dorais devient officiellement un étudiant-athlète du Rouge et Or de l’Université Laval.

Au départ, le plan est de faire compétitionner Mathieu dans la catégorie parasport, avec un poids de 6 kilogrammes. Il serait probablement le seul au Québec dans cette catégorie, mais il pourrait s’entraîner avec l’équipe universitaire et profiter de l’encadrement du Rouge et Or. Ses performances ne produiraient toutefois aucun point au classement universitaire par équipe, celui qui compte pour l’obtention des fameuses bannières de champions du RSEQ.

Puis arrive le 2 décembre 2023. Une première compétition officielle. À la maison, au PEPS, de surcroit. Et Mathieu s’en tire bien. Un lancer de 10,76 mètres à sa deuxième tentative. Puis, Sherbrooke le 13 janvier. Une autre progression dans ses performances. Il atteint le plateau des 11 mètres.

Et, la grande nouvelle. Lors de la prochaine compétition, à McGill le 27 janvier, Mathieu ne sera plus seul dans sa catégorie. Pourquoi? Parce qu’il performera dans la classe ouverte universitaire. Contre des étudiants-athlètes sans handicap. Avec un poids de 7,26 kilogrammes. Et pour la première fois, il pourra générer des points pour son équipe.

Mathieu Dorais, le grand sportif, le guerrier, l’homme transformé à tout jamais, a retrouvé son filet. Pas celui qu’il protégeait comme gardien de but, mais celui qui l’entoure au moment de lancer.

Mathieu a surtout retrouvé la flamme qui l’animait avant cette mésaventure. Cette flamme qui fait de lui, aujourd’hui, un étudiant-athlète unique. Un homme unique.