Affouage : Formation féminine au bûcheronnage en forêt sectionale

Type de commun foncier

Il s’agit de sections de commune. La forêt de Miaune est une forêt ancienne de 171 ha ; elle est indivise entre les sections de commune suivantes : Artias, Artites, Lachamp, Le Corset, Lingoustre, Ribes (commune de Retournac), Orcerolles (commune de Roche-en-Régnier) et Besse (commune de Solignac-sous-Roche). Les ayants droit à l’affouage de cette forêt sont les membres de ces sections de commune, c’est-à-dire les habitants ayant leur domicile réel et fixe sur l’un de ces hameaux (on retient localement le critère d’une habitation permanente depuis au moins six mois, à la date du tirage au sort des lots d’affouage). Cela correspond à 110 membres. Conformément aux dispositions du Code général des collectivités territoriales, ces différentes sections sont gérées par le conseil municipal en l’absence de commission syndicale.

Brève histoire de la forêt de Miaune

En 1265, le seigneur Guigon de Roche organisa l’usage de la forêt par les habitants, notamment en donnant à ceux d’Artias la faculté de pouvoir couper du bois vif ou mort. D’autres actes (en particulier en 1310 et 1682) confirmèrent ces droits tout en délimitant la forêt de Miaune et précisant les bénéficiaires. A partir de 1850, la forêt fut gérée par l’Administration des Eaux et Forêts (aujourd’hui par l’Office national des forêts – ONF). En 1936, le préfet de la Haute-Loire installe une commission de garants représentant les usagers des sections de commune, sur décret du Président de la République Albert Lebrun. Puis dans les années 1980, la représentativité des ayants droit s’efface progressivement et ils sont de moins en moins consultés. Cependant, en 2006, en réaction à la proposition de plan d’aménagement forestier de l’ONF pour les 20 années à venir, un collectif se forme pour demander au préfet de la Haute-Loire la création d’une commission syndicale qui éviterait aux ayants droit d’être écartés de la gestion de leur bien. À la suite du refus du préfet, des recours seront déposés par les ayants droit des sections de commune devant le juge administratif, conduisant à un blocage total de l’exploitation de la forêt. En 2010, un compromis est trouvé pour sortir du conflit et le plan de gestion de la forêt est révisé en collaboration avec l’ONF. La même année, les ayants droit élisent en leur sein, pour la première fois, les « garants de la forêt de Miaune », qui les représentent et travaillent depuis en concertation avec l’ONF, notamment pour organiser l’affouage.

Organisation concrète de l'affouage en forêt de Miaune

L’affouage en section de commune est une pratique communautaire ancestrale permettant à des ayants droit d’obtenir du bois de chauffage ou de construction pour leur consommation domestique annuelle grâce aux ressources naturelles locales. La forêt sectionale de Miaune étant soumise au Régime forestier, il revient au conseil municipal de décider chaque année des coupes à réaliser sur proposition de l’ONF, qui les met ensuite en œuvre. Cependant (v. supra, histoire), suite à un contentieux local, depuis 2010, les membres des différentes sections auxquelles appartient la forêt ont retrouvé un rôle central. Ils sont très investis dans la gestion de la forêt et par conséquent de l’affouage. Ils élisent parmi eux des « garants » ; ceux-ci travaillent avec l’ONF pour garantir les droits d’usage des membres des sections concernées et leur participation active à l’exploitation et à la préservation de la forêt, en particulier concernant la délivrance du bois d’affouage. En pratique, les « garants » partagent les arbres en lots numérotés et établissent un plan de situation de ces lots. Les arbres sont numérotés à la peinture. Les lots de bois de chauffage sont ensuite tirés au sort annuellement, généralement en décembre. Les ayants droit concernés reçoivent une invitation à se rendre en forêt à la date convenue pour participer à ce tirage au sort. Ce jour-là, chaque ayant droit tire un ticket dans l’urne municipale – utilisée pour plus de transparence. Les résultats sont affichés sur un tableau consultable par chacun. Chaque affouagiste repart avec un ticket du lot qu’il a tiré et le plan de situation de ce lot dans la parcelle de forêt exploitée.

L’exploitation des lots (arbres sur pied) se fait par les ayants droit qui doivent abattre et récupérer leur bois eux-mêmes, éventuellement aidés par d’autres ayants droit ou un professionnel forestier. Aucune autre personne n’est autorisée à travailler en forêt sectionale. En acceptant son lot, chaque ayant droit en devient responsable jusqu’à son exploitation ou jusqu’à la date limite d’exploitation, environ dix mois après le tirage au sort. Passé ce délai, un lot non-exploité est réintégré dans la dotation de l’année suivante. Les lots doivent être entièrement exploités.

Ingénierie du projet de formation

La pratique de l’affouage en forêt sectionale de Miaune étant réalisée sur des arbres sur pied, il est nécessaire que chaque usager détienne des connaissances sur le maniement des outils forestiers afin de pouvoir exploiter son lot en toute sécurité.

Dans cet objectif, les garants de la forêt de Miaune et l’Association Culturelle des Villages de Retournac, ont organisé deux journées de formation (13 et 27 septembre 2025) à destination des usagères de la forêt sectionale de Miaune, pour apprendre à utiliser la tronçonneuse en sécurité et l’entretenir. Cette formation inédite conforte la pratique de l’affouage en tant que patrimoine culturel immatériel (PCI) au sens de la convention Unesco de 2003 (l’affouage est inscrit à l’Inventaire national du PCI français depuis juin 2025 et les membres des sections de commune de Retournac ont contribué à la rédaction du dossier de candidature). Financée par le budget de la section de commune, la formation a permis à 12 femmes d’acquérir les savoir-faire dispensés par deux formatrices bûcheronnes professionnelles de l’Atelier des Possibles Haute-Loire. Elles ont été sensibilisées à l’utilisation des équipements de protection individuel, aux réglages, à la préparation et à l’entretien des machines, mais également à l’utilisation des tronçonneuses et, particulièrement, au déplacement en forêt avec les machines, au billonnage, à l’affûtage, et à l’ébranchage.