DÉCLOISONNER POUR S’ENTRAIDER, PAS POUR SE NUIRE

Un remède miracle?

Le décloisonnement des professions, ou élargissement des pratiques professionnelles (EPP), c’est le passage ou le partage d’actes posés par des titres d’emploi spécifiques vers d’autres titres d’emploi. Le concept n’est pas nouveau ni sa pratique dans les établissements.

Ce qui est nouveau, par contre, c’est la volonté du ministre de la Santé et des Services sociaux d’en faire l’un des remèdes miracles de son Plan santé pour pallier le manque de personnel. Il veut même étendre l’EPP à près d’une vingtaine de professions.

Si l’EPP peut effectivement avoir des vertus (comme augmenter l’autonomie professionnelle, favoriser l’interdisciplinarité dans les équipes de travail ou l’accès aux soins pour les usager·ère·s), il peut aussi avoir des effets néfastes sur la charge de travail.

Tout est dans le dosage

Un partage de tâches entre deux titres d’emploi peut parfois diminuer la charge de travail. Tant mieux! Mais il arrive que ce soit le contraire. Il faut donc ouvrir l’œil. Trois scénarios sont particulièrement fréquents :

  1. L’ajout de tâches non spécialisées : c’est le cas, par exemple, d’un·e technologue en imagerie médicale qui sera essentiellement assigné·e à planifier des numérisations ou à appeler des usager·ère·s.
  2. L’ajout de tâches spécialisées : c’est le cas, par exemple, du personnel professionnel ou technique appelé à combler des tâches spécialisées sans la formation adéquate, ou cantonné (s’il a la formation requise) aux seules tâches les plus exigeantes de sa pratique.
  3. L’ajout de tâches de supervision : c’est le cas, par exemple, de technologues qualifié·e·s à qui l’on confie des responsabilités de supervision et de formation auprès de personnes ayant des titres d’emploi « décloisonnés », venues leur prêter main-forte.

Quand la solution devient le problème

Nos membres sont loin de partager l’enthousiasme du ministre quant aux vertus de l’EPP. Bon nombre vivent déjà un alourdissement et/ou une intensification de leur charge de travail à cause de l’EPP, selon une enquête élargie menée auprès de 4 000 membres de l’APTS.

La même enquête révèle qu’une majorité prévoit des conséquences négatives à l’EPP sur la charge de travail, même si on lui trouve certains avantages (notamment sur l’interdisciplinarité et l’accès au soin). Et seulement quatre personnes sur dix pensent qu’il est nécessaire pour diminuer la surcharge de travail.

Quoi qu’il en soit, l’EPP aura des répercussions certaines, positives ou négatives, et celles-ci vont perdurer si l’on s’en tient à la volonté ministérielle. La vigilance est de mise, car il y aura beaucoup de pression sur le terrain pour l’implanter.

Si une situation d’EPP soulève des doutes quant à votre charge de travail, ou même des problèmes déontologiques ou de santé et sécurité du travail, vous pouvez en tout temps en parler à votre équipe syndicale locale.

POUR EN SAVOIR PLUS

aptsq.com/chargedetravail